La confiance et les sensations | 2

Norbert Macia – dimanche 10 février 2013 – Développement personnel  - 2 Comments


La confiance & Les sensations | 2

Nous avons vu dans un premier article, comment la notion de confiance était intimement liée à celle de contrat. Tout ce qui est contractualisé n’est pas écrit, ainsi le « contrat psychologique »  entre deux personnes a autant d’importance dans la relation qu’un engagement par écrit. Nous allons à présent aborder la confiance tout en explorant à partir d’un autre angle : celui des sensations. Tenter de comprendre ainsi comment les sensations peuvent être un vecteur puissant de reconnaissance, de soi-même et de l’autre, et avoir une place privilégiée  dans la disposition aux sentiments de confiance. _

« Quand on parle de quelque chose, il faut voir ce dont on parle et il faut penser à partir de ce que l’on voit. » (Martin Heidegger)_

Sensation & Sensations_

Dans le langage courant, nous avons pour habitude de comptabiliser 5 sens, la plupart du temps, ainsi qu’un sixième pour une certaine catégorie de personnes.

Si nous nous rapportons aux cinq sens traditionnellement acceptés (depuis Aristote), nous avons : la vue, l’ouïe, le toucher, le goût, l’odorat. Cependant, nous pouvons aussi d’une certaine manière, être touchés, c’est-à-dire « affectés », par ce que nous voyons, entendons, touchons, goûtons, sentons.

Ce « touché » primordial est certainement le premier des accès aux sens, celui qui fait sens, par son importance dans le fait d’accepter, ou ne pas accepter, d’entrer en relation avec quelqu’un. La façon dont nous sommes  affectés par les autres va grandement déterminer notre niveau de confiance en eux, tout comme notre degré de reconnaissance et d’acceptation.

Comprendre, c’est  toujours « prendre-avec-soi ».

Ainsi, pour comprendre quelqu’un et être compris par lui, ce n’est jamais l’affaire d’une seule personne. Seuls les manipulateurs, séducteurs et autres narcissiques pervers accordent un immense crédit à cette idée de pacotille, cette béquille de coton pour estropiés de l’âme.

Comprendre quelqu’un nécessite d’ôter le masque, baisser la garde, s’exposer et s’ouvrir aux sensations et à la présence de la rencontre, parfois, aussi, prendre des risques et encaisser des coups. La reconnaissance de l’autre, qui préfigure la relation de confiance, serait comme saisir une main tout en admettant que cette même main nous saisit à son tour, simultanément, alors même que nous nous pensions à l’origine de l’intention, à la mesure du geste.

Combien de problèmes de communication, et de confiance, naissent et se renforcent dans le ressentiment,  du fait de la négation des sensations présentes en pleine conscience du double élan physique et psychique, simultané, au cœur même de l’acte de présence  à soi et à l’autre.

Sensations & Reconnaissance

Pour reconnaître, nous devons être en mesure de connaître ce qu’il y a à reconnaître, car on ne reconnaît que ce que l’on connait déjà. Le sens d’une relation ou d’un échange se composent de ce qui se remplit des fonctions sensorielles et de la compréhension que nous en avons. Le sens, nous dit le dictionnaire technique et critique de la philosophie (1), est la « faculté de connaître d’une manière immédiate et intuitive (comme celle que paraissent manifester  les sensations proprement dites). »

Le sens, c’est donc aussi cela, des sensations, mais quelles sont ces fonctions sensorielles ?  Pour tenter de répondre à cette question, je vous propose le modèle (2) du psychologue structuraliste anglais Edward Titchener qui fut un des élèves de  Wilhelm Maximilian Wundt, psychologue et philosophe,  parmi les pères de la psychologie expérimentale._

L’approche formelle de Titchener propose trois classes de processus élémentaires de la pensée :

  • La sensation qui est « l’élément caractéristique de la perception »,
  • L’image qui est « l’élément caractéristique de l’idée »,
  • L’affection qui est « l’élément caractéristique de l’émotion »,

L’acte de reconnaissance d’une personne comme ami(e), ou ennemi,  et le choix d’investir cette personne de notre confiance, lui arroger un pouvoir, s’inscrit au cœur même des processus relationnels agissants :

  1. La perception ouvre le panel de sensations déterminant la qualité, l’intensité, la clarté et la durée de ce qui se présente à nous,
  2. L’idée que nous nous faisons de quelqu’un nourrit notre esprit d’images faisant elles-mêmes écho à notre vécu et histoire,
  3. L’émotion nous affecte pleinement, c’est-à-dire « entre en nous », d’une manière positive ou négative.

Confiance & Jugement

On le voit donc, l’intérêt de l’approche structuraliste et le risque de cette même approche consistent dans le fait que, d’une part, nous pouvons être plus attentif à ce que nous percevons, voyons et ressentons au contact de quelqu’un, tout en étant peut-être plus facilement assujetti à la tentation d’apposer sur cette personne, une étiquette, un jugement expéditif, sans lui laisser peut-être le temps de se montrer telle qu’elle est réellement, c’est-à-dire sans prendre le temps de la connaître.

Certains parmi nous suivons notre intuition (et c’est parfois très bien ainsi) ce qui veut dire que notre intuition nous précède dans le processus. Je peux avoir confiance en moi, mon intuition, mes sensations, et m’entendre penser « ne pas sentir telle personne », ce qui caractérise un jugement instantané, immédiat, sans appel.

A l’opposé, certains autres s’entendront dire « avoir eu raison de donner du temps », car telle autre personne aura prouvé, par des faits et des actes, qu’elle était finalement digne de confiance.

Le premier exemple renvoie donc à un rapport existentiel favorisant une croyance en soi, aux dépends de la confiance envers les autres, ce qui pourrait traduire un rapport de confiance en l’être humain minoré ; alors que le second exemple renvoie à un rapport existentiel favorisant une croyance en soi créditant la confiance envers les autres, ce qui pourrait traduire un rapport de confiance en l’être humain majoré.

Entre ces deux positions, existe-t-il une troisième voie ? C’est ce que nous tenterons d’approfondir et développer une prochaine fois._

Ressources de l’article

1. Vocabulaire technique et critique de la philosophie, André Lalande, Éditions puf, Collection Quadrige Dicos Poche, Paris, 2010

2. Psychologie cognitive, Collectif sous la coordination de J.-L. Roulin, Éditions Bréal, Collection Grand Amphi, Paris, 1998

Norbert Macia, éducateur sportif de son premier métier, après 10 années d’expérience dans le secteur du sport et des loisirs, Norbert Macia se reconvertit, en 2006, au coaching professionnel auprès des particuliers et des entreprises. Diplômé de l’Institut d’Études Politiques d’Aix-en-Provence en 2005, il s’oriente vers un troisième cycle universitaire en coaching qu’il obtient en 2006 à la Faculté d’Économie Appliquée d’Aix-en-Provence. Il intervient depuis lors auprès de grandes entreprises et institutions, tout comme dans différentes associations, réseaux et PME-TPE. D’un naturel accueillant et disponible, entrepreneur par vocation et rigoureux de par sa formation, il propose un travail, tant individuel que collectif, à partir des représentations et des croyances de chacun, de l’inventivité en équipe, de la spontanéité et la créativité comme ressources fondamentales, de l’implication et l’appropriation comme garanties de succès.

Mise en ligne : 10 février 2013

A propos de l’auteur

Cet article a 2 commentaires

  1. La Muse du Manager

    Merci pour cet article très bien construit. Bonne continuation

  2. Norbert Macia

    Merci à vous pour ce commentaire.

    Cordialement

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